InFOrmation syndicale

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16 mars 2016

À bas le projet de loi Valls/Berger !

par Michel Le Roc’h, secrétaire général de l’UD CGT-FO de Loire-Atlantique

Le premier ministre a présenté ce lundi 14 mars, une version « corrigée » du projet de loi El Khomri. Il a évoqué un « nouveau départ » et, sans surprise, la CFDT a salué « un texte de progrès pour les jeunes et les salariés ». Pour sa part, Pierre Gattaz a simulé la déception et invité le premier ministre à ne pas lâcher davantage. « S’il y a encore des reculades sur ce texte, c’est la fin des haricots », a-t-il lâché sur les ondes des radios nationales.
Mais dans les faits, personne ou presque n’est dupe de la poursuite du petit jeu entre amis, consistant à tenter de sauver du naufrage un gouvernement en crise et aux abois  (1). Le projet de loi suscite un rejet profond et ce ne sont pas les quelques modifications annoncées qui vont changer cet état d’esprit, bien au contraire.

Les critères de licenciements économiques restent tout aussi arbitraires, mais le juge pourrait vérifier que les multinationales n’organisent pas artificiellement leurs difficultés économiques sur le territoire français pour licencier. Bonne chance au juge… Les patrons des PME de moins de 50 salariés ne pourraient pas mettre en place directement les conventions de « forfait-jour » sans obtenir « un accord majoritaire » (2). Le barème qui devait plafonner les indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif ne serait utilisé qu’à titre indicatif.

Et pour tenter de désamorcer la fronde qui gagne la jeunesse, le premier ministre a également annoncé le maintien des horaires des apprentis à 8 heures par jour et la généralisation d’une « garantie jeunes » qui n’est en fait que la généralisation de la précarité (3).

En fait, cette nouvelle version ne modifie pas la philosophie générale du projet de loi. Les modifications apportées ne le sont qu’à la marge. Avec l’aplomb qui le caractérise, le ministre de l’Économie Emmanuel Macron a d’ailleurs prévenu, à l’occasion de la conférence de presse organisée en commun avec le 1er ministre et la ministre du travail, que le plafonnement obligatoire des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif serait un jour une réalité. Mais voilà, pour obtenir le soutien plein et entier de la CFDT, il fallait passer par là et faire quelques concessions. Voilà les patrons rassurés !
La nouvelle version du projet de loi, comme l’ancienne, remet en cause la finalité même du code du travail : protéger les salariés. Il organise la primauté quasi-systématique de l’accord d’entreprise sur les accords de branche. Aujourd’hui, quand un accord d’entreprise est signé, il ne peut qu’améliorer les dispositions contenues dans l’accord de branche. Demain, si le texte n’était pas retiré, il pourrait déroger à l’accord de branche et deviendrait la principale source de droit du travail. Comme l’a souligné Jean-Claude Mailly, « il s’agit de remettre en cause la nature des relations sociales en vigueur en rabougrissant le Code du travail, en affaiblissant le niveau national de la branche, en donnant la priorité à celui de l’entreprise et en court-circuitant les syndicats. Ce qui constitue rien de moins qu’une inversion sociale (...) ».

La philosophie générale du projet de loi, donnant la priorité « aux relations sociales » dans l’entreprise, est inspirée de la doctrine sociale de l’église, dont la CFDT et le nouveau « PS » sont les ardents défenseurs. L’entreprise serait ainsi une « communauté de travail » où « les deux classes -salariés et patrons- sont par la nature destinées à s’unir harmonieusement dans un parfait équilibre » Encyclique Rerum Novarum, 1891 (lire «Arguments» en page 7 de L'Ouest-Syndicaliste n°664).


De fait, ce projet de loi s’inscrit en totale cohérence avec un ensemble d’offensives ciblées et méthodiques contre les acquis de la République. Gouvernements de « gauche » et de « droite » confondus, MEDEF, accompagnateurs syndicaux de service avec à leur tête la CFDT, on retrouve toujours le même trio à la manœuvre : de « l’Europe des régions » au projet Hollande-El Khomri, en passant par la destruction/privatisation des services publics et de la protection sociale, sans oublier le dynamitage en règle de la laïcité.

Il est maintenant nécessaire de stopper cette offensive générale contre les acquis de la classe ouvrière. Après le succès de la journée de mobilisation du mercredi 9 mars (4) contre le projet de loi « El Khomri », nous allons maintenant nous employer à préparer les conditions d’une mobilisation monstre le 31 mars.

Alors le 31 mars, pour le retrait du projet de loi Valls-Berger, tous  en grève !

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(1) Le jour même où le 1er ministre présente ses modifications, Jack Lang interviewé sur Challenges a lancé une charge contre le gouvernement : « Je ne veux pas donner des leçons, mais jamais il ne me serait venu à l’esprit, quand j’étais ministre de l’Éducation nationale, d’annoncer une grande réforme sans avoir préparé les choses. Je ne comprends pas que des personnes aussi intelligentes que François Hollande et Manuel Valls n’aient entrepris aucune pédagogie préalable. Je ne comprends pas non plus le timing », a dit l’ancien ministre concernant la loi El Khomri. Preuve que le bateau tangue sévèrement au sommet de l’état.
(2) La CFDT se félicite de cette mesure qui lui permettrait, comme à l’occasion de la mise en place des 35 heures dans les entreprises de moins de 50 salariés au début des années 2000, de mandater un salarié, même non syndiqué, pour la représenter dans la négociation.
(3) Les jeunes sans emploi, ni formation seraient censés accéder à cette « garantie jeunes ». Ce dispositif offrirait, pour une durée d’un an, un accompagnement renforcé, des périodes en entreprise et une allocation mensuelle de 450 euros... Bref, la précarité généralisée !
(4) Les « jaunes » ont eu moins de chance le 12 mars en ne réunissant que quelques centaines de militants. Le ministère de l’intérieur n’a d’ailleurs pas osé donner un chiffre précis de participants !